L’Institut D. dans le Low-Tech journal

Découvrez dans le hors-série spécial Écoles d’ingénieurs et de design du Low-Tech Journal, l’engagement de notre école dans les pratiques de conception vertueuses. Un beau témoignage de Louise, étudiante en 3e année, et un gros plan sur le parcours du bac+1 au bac+5.

D.compliquer la formation en design

Fonder une école
à taille humaine
en toute frugalité

L’Institut D., abréviation pour l’Institut Supérieur de Design de St-Malo, est la première école coopérative d’intérêt collectif (SCIC) de France. Ce modèle coopératif a permis de s’inscrire dans l’écosystème territorial de façon fluide, mais aussi de le développer par le design. Chaque nœud acté dans ce réseau mobilise et valorise les ressources vives locales pour donner forme à des projets visant une juste réponse aux justes besoins.

Volontairement dimensionné aux proportions de son territoire et engagé dans la promotion des principes d’un design humain, conscient, essentiel et soutenable, l’Institut D. résonne instinctivement avec l’approche low-tech. Du Bachelor « Design et Sociétés nouvelles » (DSN) au Master of Science « Design des transitions et Conception biomimétique » (DTCB), l’accent est mis sur la transmission des pratiques d’un design d’innovation sociale et écologique.

 

Basse technologie,
études supérieures

Si l’approche n’a pas été sciemment présente dès la création de l’école, les low-tech apparaissent naturellement dans plusieurs disciplines connexes. « Écodesign », « Composition/décomposition », « Économie circulaire & régénérative » donnent le ton dans le cursus DSN. D’autres matières, que l’on penserait plus éloignées, comme « Ergonomie des interfaces » ou « Production éditoriale » vont néanmoins questionner les enjeux inhérents à la low-tech pour revenir à l’essentiel et à l’utile, pour redonner du sens à l’action et repenser les communs. Dans le Msc DTCB, ouvert en septembre 2022, ce lien est d’autant plus affirmé : on y consacre un module de 21 heures dédié aux low-tech, en collaboration avec Pierre-Alain Lévêque (cofondateur du Low-tech Lab/Base low-tech).

Mais quoi de plus low-tech que le vivant ? Les cours de « biomimétisme », « économie circulaire/régénérative » ou « design d’interrelations » alimentent cette démarche de sobriété globale.

D’après Julien Vey, président de l’Institut D., « apporter cette couleur à nos formations dépasse la considération éthique ; l’avenir nous contraindra à une pratique du design responsable et à concevoir des systèmes bio-inspirés par et pour le vivant. Pas de création sans envisager l’impact systémique de nos actions. »

 

Faire rayonner un design engagé
au-delà des murs

En expérimentation sur le terrain, les jeunes se confrontent à des réalités diverses et font face à un décalage entre l’enseignement pratiqué à l’Institut D. et un monde habitué, voire dépendant, d’un besoin qui exhale la haute technologie. Ce contraste est très formateur. L’étudiant réalise combien il est de sa responsabilité de proposer des solutions qui puissent réduire l’impact environnemental et social. La période en entreprise est un deuxième terrain de jeu pour déployer un design soutenable : les temps de stage et d’alternance des étudiant·e·s permettent une insertion dans le tissu économique local.

Peut-on parler
de pédagogie low-tech ?

Au-delà de déployer les principes de la low-tech, de les enseigner et de les faire rayonner sur le territoire, il y a au sein de l’établissement une dernière dimension low-tech non négligeable : l’instauration de relations pédagogiques de « basse technologie ». La relation enseignant/étudiant est remodelée, avec, par exemple, la refonte des espaces traditionnels de l’enseignement. Plus de séparation physique entre la salle des professeurs et les ateliers : travailler ensemble pour permettre de nouvelles interactions débridées entre apprenant et enseignant. Les actions pédagogiques visent une certaine transparence pour rendre appropriables les enjeux et partis pris de leur formulation. Des relations simplifiées donc, qui infusent chez l’étudiant la capacité de faire des choix conscients de leurs dépendances.

 

Interview:
Louise Cousin,
étudiante en 2e année
du Bachelor DSN

Qu’est ce qui t’a intéressé dans la low-tech et poussé à chercher un stage en lien avec cette approche ?

J’ai baigné dans la low-tech depuis l’enfance, sans le savoir. Mon père bricoleur fait beaucoup avec peu. Il aime réparer les objets pour qu’ils durent dans le temps, et ma mère est engagée professionnellement et personnellement dans l’innovation et l’économie circulaire. J’ai aussi un grand-père très bricoleur qui a créé et fabriqué de nombreux outils lui-même.

J’avais quatre ans lorsque mes parents ont construit une maison bioclimatique quasi autonome. Le réseau d’eau est chauffé par un poêle à bois « bouilleur » et des panneaux solaires, qui produisent aussi une partie de l’électricité. On récupère les eaux de pluie pour les toilettes, le lave-linge et le jardin. Mon éducation est donc grandement influencée par ces pratiques de consommation durable, de jardinage permacole, d’alimentation bio et de réparation et réemploi. À travers ces modèles, l’aspect du design qui me correspond le mieux est évidemment en lien avec le bricolage, la réutilisation, la valorisation de déchets, et le vivant.

J’avais tous ces enjeux à l’esprit lors de ma recherche de stage.

 

Que comprends-tu de la philosophie low-tech ?

La philosophie low tech prône un retour aux véritables besoins et à des niveaux technologiques accessibles. Proposant des solutions de qualité, durables et à bas coût. Ce mouvement contredit l’obsolescence programmée omniprésente. Il tend à une consommation raisonnée et minimaliste. Une sobriété toutefois joyeuse et créative. Il propose également de repenser notre façon de consommer en intégrant le réemploi et le recyclage des matériaux, visant à réduire les dépenses énergétiques et matérielles.

Pour moi, les approches low-tech assurent durablement l’essentiel de manière économique, écologique et éthique. Elles encouragent à travailler avec des artisans locaux pour retisser des liens humains. L’enjeu est de créer avec sobriété, sans retour en arrière et en intégrant les savoir-faire d’aujourd’hui. Ainsi, la low-tech paraît la solution la plus désirable pour innover.

 

Pendant ton stage en entreprise (Cahute), qu’as-tu pu expérimenter comme processus d’intégration des principes low-tech ?

Cahute est une entreprise bretonne de fabrication artisanale et écologique de tiny houses. J’y avais plusieurs missions concernant la low-tech.

Premièrement, valoriser les chutes de bois et autres types de matériaux de l’entreprise. J’ai réalisé des mobiliers en bois et des prototypes réemployant différents matériaux en pensant durabilité, soutenabilité et facilité de reproduction. Par exemple, avec les chutes de pare-pluie et la sciure de bois, j’ai imaginé des poufs extérieurs pouvant résister aux intempéries tout en restant confortables.

Ensuite, j’ai proposé une alternative low-tech au site Web actuellement très énergivore. Le dirigeant de l’entreprise m’a parlé du Low-tech Magazine comme une source d’inspiration. Le site Web auto-hébergé peut fonctionner à l’énergie solaire, mais il se retrouve parfois hors ligne pour des raisons météorologiques. Hélas, je n’ai pu explorer davantage ce projet faute de temps. Cependant, j’ai beaucoup appris concernant les sites Web low-tech grâce à mes recherches.

J’ai par ailleurs créé une collection de modes d’emploi sur les fonctionnements des tiny houses. L’objectif étant de faciliter la prise en main des clients et de les rendre plus autonomes.

Enfin, j’ai collaboré au chantier participatif d’une maison démontable en isolation paille à Saint-André-des-Eaux, dans un écolieu de l’association Hameaux Légers. J’ai découvert une réelle niche à idées, et surtout des personnes inspirantes pour lesquelles la valeur collective est primordiale.

Dans quelle mesure mobilises-tu les low-tech dans ta pratique du design ?

L’Institut D. est une école engagée, ouverte à ce genre de techniques, avec un grand réseau d’entreprises bienveillantes. Les enseignant·e·s nous encouragent à aller vers les low-tech et je trouve ça vraiment remarquable.

Au départ de tous mes projets, je pense à l’économie, au réemploi de ce qu’il y a autour de moi, à réparer plutôt que d’acheter du neuf, à me déplacer sobrement, à acheter local, à vendre, donner ou transformer ce dont je n’ai plus besoin ; bref, à consommer moins et mieux.

Concernant les low-tech et le design, beaucoup d’idées émergent pour l’habitat et l’accessibilité à toutes et à tous. J’ai une vie entière pour expérimenter, découvrir des pratiques, cultiver, créer et innover.

Témoignage :
Pierre-Alain LÉVÊQUE
“Base Low-Tech”

Pierre Alain collabore en appui pédagogique sur le module “culture LOW-TECH” du cursus DTCB N2.

Pierre-Alain LÉVÊQUE, co-fondateur de l’association Low-Tech Lab à Concarneau et fondateur de “La base Low-tech” en Baie de Saint-Brieuc (22) est le partenaire pédagogique de l’Institut D. pour le déploiement du module “culture LOW-TECH” intégré au cursus DTCB-Année 2 (module de 21h d’enseignement).

“ Il y a un enjeu majeur de diffusion des savoirs et des expériences autour de l’approche Low-Tech qui implique l’articulation d’un vocabulaire commun et la création d’un socle de connaissance et de méthodes partagées pour pouvoir passer à l’action de façon pertinente. Pour ce faire, j’ai créé une formation en ligne de 9h destinée aux écoles, aux particuliers et aux professionnels. Pour l’enseignement, l’objectif est de former des enseignants motivés sur ce sujet afin qu’ils puissent ensuite intégrer l’approche Low-Tech dans leurs projets pédagogiques. Toutes les ressources de cette formation sont également mises à disposition de leurs étudiants. J’assure un suivi complémentaire de quelques heures pour répondre à leurs questions et affiner les notions utiles avec eux. L’accès à un serveur Discord dédié complète la formation afin qu’une communauté de partage de pratiques s’organise et qu’un maillage territorial se construise grâce à des temps de rencontre ponctuels.

Dans le cadre du cursus de l’Institut D, Damien Serres à d’abord suivi ce module pour ensuite déployer les 21 heures de cours adaptées aux enjeux de formation des étudiants en “design des transitions” et en contextualisant la démarche via un travail pratique sur l’organisation d’un évènement culturel.

En parallèle, la construction de la Base Low-Tech servira de lieu d’inspiration, de démonstration et de test pour cristalliser l’approche Low-Tech sur le territoire. La phase de construction du bâtiment est un bon support pédagogique pour les différents publics et l’organisation de parcours éphémères permettra une contextualisation pour mieux comprendre les logiques et problématiques organisationnelles spécifiques de gestion d’un chantier participatif.

Une fois finalisée, la Base Low-Tech sera un catalyseur de développement de projets et d’activités intégrant l’approche Low-Tech grâce à des sessions de “voyages apprenants” pour des groupes d’étudiants possiblement hébergés sur place. L’immersion et les méthodologies de prototypage rapide faciliteront l’appropriation concrète de la pratique.

Le futur “Pôle de Recherche-action” sur les enjeux techniques et sociaux envisagés via le prisme de la Low-Tech sera le terreau fertile à l’intégration et la diffusion de cette approche sur le temps long. La constitution d’une documentation ouverte et participative favorisera la mise en lien et la collaboration des différents acteurs engagés ainsi que le rayonnement de l’approche Low-Tech au service des porteurs de projets de transitions sur le territoire.”

 

Double page sur l’Institut D.