Workshop Numérique & Démocratie/Inclusivité.

Retour en images sur notre « workshop Propagande Sociale » qui a eu lieu la semaine dernière ! Les étudiants ont travaillé sur le projet « Numérique & Démocratie/Inclusivité », explorant comment les technologies numériques peuvent favoriser la transformation durable des organisations. Merci à b<>com et à tous les participants pour cette semaine enrichissante.

Nos étudiant·e·s ont du réfléchir, dans une démarche de design fiction, à des solutions pour rendre l’innovation plus participative et démocratique. Le tout est synthétisé dans une présentation et un poster taille A0 (84,1 cm x 118,9 cm) par groupe.

contexte : Une urgence environnementale et sociétale

Les urgences environnementales et sociétales auxquelles le monde fait face sont actées par de nombreuses organisations scientifiques, qui ne cessent d’alerter quant à leur gravité (e.g., Haut Conseil pour le climat, 2023).

202311 ; Richardson et al., 2023 ; Rockström et al, 2009 ; Steffen et al., 2015 ; O.D.D.S, 2015 ; World Economic Forum, 202316, etc.). Ainsi, si aucune action n’est mise en place, au niveau mondial, gouvernemental, organisationnel et individuel, les conditions d’habitabilité de la terre risquent de devenir insoutenables. Au niveau environnemental, en ne prenant que l’exemple de la France, d’après le Haut Conseil pour le climat (2023), l’année 2022 a été « emblématique » du réchauffement climatique, avec des événements climatiques et météorologiques intenses. Les émissions de Gaz à Effet de Serre (GES) doivent être réduites de 43% d’ici 2030 pour réussir à ne pas dépasser un réchauffement climatique de 2 degrés par rapport à l’ère préindustrielle. En dépit de cela, les engagements actuels de réduction des émissions de GES des États ne représentent, actuellement, qu’une baisse de 2% par rapport à 2019. En parallèle, parmi les neuf limites planétaires identifiées, six ont été déjà dépassées, et ce majoritairement à cause de l’activité humaine (Richardson et al., 2023 ; Rockström et al, 2009 ; Steffen et al., 2015).

Déficits des innovations

Pour faire face à ces enjeux, différentes démarches d’innovation sont mises en place, mais celles-ci ne sont ni forcément bénéfiques, ni impactantes. En effet, Von Schomberg (2019) a identifié des manquements et déficits liés aux innovations mises actuellement sur le marché :

Les réglementations gouvernementales, uniquement axées sur des enjeux de risque et sécurité des nouvelles technologies ;

Un manque d’innovations souhaitables a été relevé, en termes de marché. En effet, ces dernières ne répondraient pas à « des valeurs publiques largement partagées dans des contextes d’innovations spécifiques où le changement transformateur est devenu socialement souhaitable, pratiquement dans tous les sujets touchant au développement durable et/ou aux questions qui dépendent d’un patrimoine commun de connaissances » (notre traduction) ;

Dans cette même lignée, il est souligné un manque de prise en compte des attentes citoyennes ou organisationnelles partagées des innovations car ces dernières peuvent ne pas répondre à des valeurs ou à des attentes publiques. Ici, Von Schomberg (2019) se base sur les déclarations de Lund (2009), qui stipulent que la croissance économique est conditionnée au contexte sociétal ;

Les organisations ont davantage tendance à vouloir trouver des moyens pour développer des innovations ou technologies de manière responsable, plutôt que de créer un produit final responsable ;

Le manque d’anticipation vis-à-vis des innovations a été relevé comme une problématique.

(Des)innovation responsable

Finalement, entre l’existence d’un plancher social et d’un plafond environnemental (Raworth, 2017), la juste place de l’innovation et des technologies se pose. Comment, pourquoi et jusqu’où innover dans ce contexte de crise ? Comment l’innovation peut-elle satisfaire les 3 cadres (économiques, sociétaux, environnementaux) simultanément ? Comment les organisations peuvent-elles revoir la finalité de leurs innovations et leurs processus d’innovation pour y répondre ? Comment se saisir collectivement des enjeux environnementaux et sociétaux futurs pour amorcer une trajectoire soutenable ?

Pour ce faire, il semble nécessaire, pour les organisations (entreprises, collectivités, territoires, associations, etc.), de se transformer, en renforçant leurs compétences dans la transition écologique (e.g., OCDE, 2023; UNU, 2023). Il est toutefois nécessaire de noter que les contraintes auxquelles font face les organisations sont également économiques. Dans ce cadre, l’innovation désigne « l’introduction sur le marché d’un produit ou d’un procédé nouveau ou significativement amélioré par rapport à ceux précédemment élaborés par l’unité légale » (INSEE, 2020). L’innovation implique donc des contraintes économiques pour les organisations, qui doivent nécessairement être prises en compte dans leur transformation.

Un modèle de réponse adapté face à l’ensemble de ces questionnements et pouvant répondre à cette transformation organisationnelle est l’approche de l’innovation responsable (e.g., Owen et al., 2013 ; Stilgoe et al., 2013). En effet, selon Von Schomberg (2019), la démarche d’innovation responsable pourrait répondre aux déficits cités précédemment.

L’innovation responsable a été définie comme le fait de « prendre soin de l’avenir par une gestion collective de la science et de l’innovation au présent » (Stilgoe et al., 2013, p.1570, notre traduction). Elle cherche à savoir quel type de monde nous souhaitons voir advenir tout en tentant de répondre aux grands enjeux de la société (Owen & Pansera, 2019).

D’après ces derniers auteurs, de nombreuses recherches intégrant l’innovation responsable sont apparues ces dernières années, et se sont principalement portées sur les thématiques du numérique, de la santé, etc. Toutefois, peu de connaissances ont été acquises sur ce qui peut être mis en place pour encourager la transformation durable des organisations, via l’innovation responsable (Randles, 2017). De plus, Owen et al. (2021) ont constaté qu’« il y a eu étonnamment peu d’échanges entre les spécialistes de l’innovation responsable et le corpus considérable d’études relatives à l’institutionnalisation et à la dynamique du changement organisationnel (Genus and Iskandarova, 2018; Randles, 2017) ». (p2, notre traduction).

Globalement, pour les organisations, les bénéfices des innovations responsables sont variés (voir Lehoux et al., 2019, pour un recensement des buts). Elles permettent d’ouvrir de nouveaux marchés et de répondre à des besoins autres que ceux qu’elles pouvaient déjà investiguer. Deuxièmement, de par ses objectifs de réponse à des enjeux sociétaux ou environnementaux, la mise en place d’innovations responsables peut permettre aux organisations d’améliorer leur image de marque, mais également de rendre leur produit ou procédé désirable socialement (Von Schomberg, 2019). Enfin, le caractère anticipatoire des innovations responsables permet aux entreprises de prendre en compte les problématiques et risques futurs, voire des réglementations à venir.

Pour guider l’innovation responsable, quatre critères ont été identifiés (Stilgoe et al., 2013) : l’Anticipation, la Réactivité, l’Inclusivité et la Réflexivité (aussi nommés critères ARIR). Ce travail théorique, selon Verburg et al. (2020), constitue le construit le plus utilisé dans le domaine de la recherche sur l’innovation responsable. Ces critères permettent de guider les organisations dans la mise sur le marché de produits innovants responsables.

Inclusivité et innovation participative

Il conviendra ici de se concentrer davantage sur un de ses 4 critères, à savoir celui de l’inclusivité. L’inclusivité représente le fait d’« ouvrir les visions, les objectifs, les questions et les dilemmes à une large délibération collective par le biais de processus de dialogue, d’engagement et de débat, en invitant et en écoutant des perspectives plus larges de la part des publics et des diverses parties prenantes. » (Owen et al., 2013, notre traduction). Cette dimension participative est retrouvée dans plusieurs démarches, approches ou actions (e.g., Assemblée citoyenne des imaginaires ; Coalition For Digital Environmental Sustainability, 2022 ; Van Osch et al., 2010).

Il s’avère que les technologies numériques peuvent faciliter la participation des parties prenantes (e.g., Casemajor et al., 2019 ; Dias da Silva et al., 2017 ; Maciuliene & Skarzauskiene, 2020 ; Saldivar et al., 2019), via notamment la mise en place de plateformes participatives (e.g., Budget participatif de Rennes) et de l’intelligence artificielle (e.g., Falgas & Robert, 2023). Pour autant, il s’avère que peu de plateformes [civic tech] permettent de créer des communautés d’usagers engagées, voire même résilientes (Knight Foundation & Rita Allen Foundation, 2017, lu dans Maciuliene & Skarzauskiene, 2020).

Des travaux plus spécifiques de l’apport de certaines technologies sont également menés. Concernant l’intelligence artificielle, par exemple, certains émettent l’idée selon laquelle cette technologie pourrait répondre aux enjeux complexes comme le climat, la santé, l’environnement, etc., via l’organisation de l’ensemble des informations émises par les participants (Falgas & Robert, 2023) ou la capacité d’agrégation des données (Dias da Silva, 2017). Dans ce contexte également, les technologies d’intelligence artificielle pourraient analyser les contenus de débats, argumentations ou d’entretiens issus des plateformes participatives (Aitamurto et al., 2016, cités dans Saldivar et al., 2019).

Pour autant, ces technologies ne sont ni neutres ni sans conséquences. Des moyens non numériques / non technologiques peuvent être imaginés en parallèle afin de favoriser l’advenue de processus d’innovations plus participatifs, voire de débats / controverses collectives sur les nouvelles technologies.

Présentation de b<>com

b<>com est un Institut de Recherche Technologique (IRT) qui explore, conçoit et fournit les technologies numériques de demain pour accélérer les transitions. En s’appuyant sur son cercle d’industriels et d’académiques, l’Institut de Recherche Technologique développe des projets de R&D au service de la compétitivité des entreprises. Il promeut l’intelligence augmentée et l’efficacité énergétique pour améliorer les processus industriels. L’objectif : apporter des réponses innovantes aux besoins des marchés ainsi qu’aux enjeux de décarbonation et de confiance numérique. Ses technologies sont développées pour les infrastructures vitales, la défense, l’agri/agro, la sécurité, la santé, l’industrie 5.0 et les industries culturelles & créatives. Ses experts innovent dans les technologies numériques sécurisées (cloud, cybersécurité, IA) et les mettent au service du traitement des signaux, des contenus et des réseaux (connectivité, vidéo & son, jumeaux numériques, facteurs humains).

Laboratoire “Numérique & Société” & travaux de prospective

En parallèle de ces travaux, depuis 6 ans, un laboratoire de recherche, à b<>com, intitulé “Numérique & Société” investigue plus spécifiquement les enjeux environnementaux et sociétaux associés aux nouvelles technologies.

Plusieurs projets de prospective ont ainsi été menés (autour de l’impact de l’IA sur le futur du travail, autour du numérique responsable, etc.). Un groupe d’une vingtaine de chercheurs composent ce laboratoire, regroupés au sein de 3 grands champs de compétences:

  1. Les sciences humaines et sociales (philosophes, sociologues, psychologues, juristes, etc.)
  2. Le design (UX/UI Design, Design Thinking, Design Fiction, etc.)
  3. La prospective

Le projet SHARE

Ce workshop s’inscrit dans le cadre d’un nouveau projet de recherche, déposé auprès de l’ANR (Agence Nationale de la Recherche), mené par b<>com et ses membres, intitulé SHARE (durée: 3 ans / janvier 2024 – janvier 2027).

Le projet SHARE vise à favoriser la transformation durable des organisations en améliorant leurs capacités d’anticipation, de redirection et d’intelligence collective, par l’intégration de méthodologies relatives au design, aux sciences humaines et sociales, à la prospective et au traitement de données massives textuelles.

En partenariat avec :

  • Animé par Martin Ragot, chercheur en sciences cognitives et Nicolas Doizy UX designer

  • À la demande de b<>com

  • Réalisé par les promotions de 2ème année du Bachelor Design et Sociétés Nouvelles et 3ème année de la Licence Pro Commerce Connecté à Bruz/ Faculté des Métiers

DNMADE Design et Sociétés Nouvelles (Bac+3)

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